Bu$hi : « Bushi Tape 2 », un éventail d’influences

Bu$hi nous sert du très lourd avec sa nouvelle mixtape « Bushi Tape 2 ». Parue il y a un peu plus d’une semaine : le rappeur Lyonnais, membre du collectif Lyonzon et du groupe Saturn Citizen avec son acolyte Mussy, revient deux ans après la sortie du projet « Bushi ».

Un pied aux États-Unis

Toujours dans la lignée de ses dernières mixtapes, les influences de la grosse scène US [en particulier de la « new wave » amorcée au milieu des années 2010 par les « emo-rappeurs »] se font ressentir. Notamment au niveau des beats, où il s’est entouré de pionniers des hits américains et britanniques. On retrouve Wonda Gurl et 808 Melo [producteurs pour Drake, Travis Scott, Pop Smoke ou encore Pusha T] qui signent la prod drill de « Big Ben ». Ou encore PVLACE et Dj Durel [bras droit des Migos] sur le son « Parachute », aux sonorités trap mais très wavy.

Pourtant, c’est le beatmaker franco-algérien TaemminTekken qui est derrière 90 % des prods de la tape. Pour la plupart, elles nous ramènent aux ambiances emo-rap/rock que l’on retrouve beaucoup chez SoFayGo, Ghostemane ou Trippie Redd. Plus anciennement encore chez XXX Tentacion ou Ski Mask The Slumpgod.

Tantôt hip-hop, tantôt Lo-Fi, mais aussi rock, drill, trap, cloud, et hyperpop (électronique), c’est tout un éventail d’influences qui propulse la mixtape au-delà des frontières du rap francophone.

Les lyrics et images travaillées de bushi

En accord avec son flow détaché, on retrouve dans les lyrics cette légèreté efficace dont il a le secret. Il se démarque cette fois-ci avec un réel travail linguistique truffé de métaphores et d’allitérations. « C’est moi qui pilote sous purp’, sous pilons, j’veux juste le pain/ pas d’potos c’est des putes à potes » – Marathon. Axé autour d’une multitude de références culturelles et personnelles qui l’inspiraient déjà, tels que les animés, la mode, le cinéma, les relations hommes-femmes ou encore les jeux-vidéos.

Pour en citer quelques exemples, il sous-entend dans « Parachute », la beauté de son accomplissement en faisant allusion au réalisateur Wes Anderson, connu pour son esthétique colorée et solaire.

« P’t’être qu’on a percé/ On dirait que j’suis dans un film de Wes Anderson »

Parachute – Bu$hi

Dans « Link Up », il fait un autre clin d’œil, cette fois-ci au chanteur de heavy metal britannique Ozzy Osbourne. Il était surnommé le « Prince des Ténèbres », en référence à son mode de vie extravagant.

« C’EST NOUS LES NOUVEAUX PRINCES, LES OZZY OSBOURNE« 

Evidemment, on ne peut pas dissocier Bu$hi du monde des animés, qui est un des sujets primaires de sa musique. D’abord de Naruto à Dragon Ball Z. Puis de Batman à Southpark dans « Big Ben ». « Si j’suis le Joker dis-moi c’est qui Batman, si j’suis Token dis-moi c’est qui Cartman ». Le Joker étant l’ennemi de Batman et Cartman celui de Token. Bu$hi veut-il nous faire comprendre qu’il est trop loin pour ses ennemis ?

On voit donc bien la propension de Bu$hi à vouloir se montrer comme avant-gardiste ou futurise. Et cela est encore plus palpable au travers de ses références vestimentaires, notamment avec cette punchline issue du titre « Goten » : « Quand j’étais en Amiri, ils étaient en Evisu » (Amiri et Evisu étant des marques de haute-couture popularisées récemment ; Amiri en 2021, quelques années après Evisu). Pour résumer grossièrement, il est encore plus dans le futur en Amiri, que ceux qui étaient déjà dans le futur en Evisu [Jay-Z, Travis Scott, Ateyaba et bien d’autres].

bushi, orfève futuriste ?

On sent, dans l’harmonie générale de la tape, un artiste plus accompli qu’auparavant. Il maîtrise son art et sait ce qu’il veut, là où ses deux derniers projets, « Bu$hi » et « Bu$hi 1.5 », étaient plus révélateurs d’une phase de quête, d’introspection. Même dans les textes, il n’était pas sûr de la portée de son art, contrairement à maintenant, où il se considère déjà loin dans le game.

« J’ai la coupe à personne, p’t’être qu’on a percé »

Parachute – Bu$hi

« Maintenant tu veux link up mais c’est trop tard »

Link Up – Bu$hi

C’est un travail mélodique de pointe, aux aspects tant « old school » que futuristes (S/O Ateyaba, son mentor). Couplé à une voix atypique et un flow nonchalant qui n’a cessé de se perfectionner depuis « Obito » ou « Millenium ». Nous offrant une technique plus sûre et travaillée, qui découpe les prods.

C’est tout cet alliage qui crée une originalité et cette vibe qu’on apprécie chez Bu$hi. En sentant malgré tout qu’il a enfin trouvé la recette parfaite, celle qui lui convient le mieux. Adepte des instrumentales aux mélodies détonantes dans ses premiers projets, il nous plonge dans une atmosphère toujours aussi lunaire mais plus comestible et minutieuse. Comme après un long passage dans la Salle du Temps.

« Le temps c’est de l’argent et l’argent c’est du temps, on veut des horloges sur nos dents »

Parachute – Bu$hi

Pour clôturer cet article, on vous conseille vivement d’écouter nos coups de cœur « Link Up », « Louis » et « Parachute », même si, honnêtement, chaque titre en vaut le détour !